Sterone : Beltrame et la mentalité des terroristes islamistes

1. Comme de nombreux Algériens il a tendance à ne plus avoir les idées claires s’agissant de la France (sur-investissement affectif) dans ses analyses : par exemple, il prétend que la France est la seule à vivre cette situation avec les djihadistes mais c’est faux : la Belgique, l’Allemagne et d’autres pays ont le même soucis. La différence c’est qu’en France, nous avons la plus grande communauté maghrébine d’Europe et donc on se retrouve avec un nombre important de profils concernés. Est-ce que cet effectif en proportion est plus important que celui de nos voisins ? Il faudrait vérifier... mais à ce jeu-là, il faudrait aussi comparer avec le pays qui a fournit le plus gros contingent de djihadistes en Syrie (la Tunisie) pour être plus juste. AS ne s’embarrasse pas de cette indispensable comparaison pour des motifs qui relèvent du registre émotionnel. 

2. Il a tendance à comparer ce qui n’est pas comparable : certains pays (comme ceux du Maghreb) ont un mode de gestion du phénomène djihadiste radical en comparaison au nôtre (et, il est vrai, plus efficace), certes, mais il serait incomplet d’oublier de préciser aussi qu’il s’agit de régimes autoritaires. C’est même la condition à ce traitement express de la situation : c’est compte tenu du mode de régime qu’il est simple pour eux de faire... disons disparaître ces individus dangereux et donc qu’ils y parviennent. En clair, oui, en Algérie ou au Maroc on traite plus efficacement la question, mais il s’agit aussi de pays où les libertés sont de toutes façons réduites pour l’ensemble de la pop.

 

3. Ces deux premiers éléments pris en comptes, les conclusions d’AS deviennent un peu foireuses et versent dans le complotisme : ici, M. Beltrame aurait été sacrifié volontairement selon lui, hypothèse n’a rien de parcimonieuse. Il semble bien plus logique de penser qu’il y a eu prise d’otage, qu’un officier expérimenté qui plus est dévoué, courageux et animé d’une double-foi (celle en la France et celle intime de sa croyance) a, en son âme et conscience, prit la meilleure décision qu’il fût : se substituer lui (un expert entraîné capable d’exploiter la moindre faiblesse et prendre le dessus) à une otage qui, elle, n’avait aucune chance. Tout son délire de sacrifice ourdi par le pouvoir tombe dés lors à l’eau. En revanche, il est tout à fait exact que cette figure de héros est tombée à merveille pour certains et qu’elle a logiquement été récupérée et allègrement exploitée par les autorités qui ont vu là une aubaine inespérée (après la passivité ressentie par la pop face à 3 années d’attentats).

4. Ce à quoi il appelle va à l’encontre même de nos principes : AS appelle à des "représailles" (par qui ? contre qui précisément ?) et nous devons bien saisir ce qu’implique ce mot : il signifie que les individus sont dépossédés de leurs responsabilités individuelles et que celles-ci sont reportées sur des groupes qui en seraient désormais porteuses. Outre le fait qu’il n’existe pas de personne morale nommée "djihadistes" qui pourrait être poursuivie, en droit français tout cela n’a aucun sens.

Cela étant il y a bien, en France, un pb de droit (par exemple les magistrats ne sont pas équipés pour juger efficacement la responsabilité des auteurs d’une agression en réunion) et il aurait été intéressant d’aborder la question sous cet angle.