Le Grand Journal traite-t-il le FN comme les autres partis ?
Le Grand Journal recevait Marine Le Pen ce 22 mars pour revenir sur le premier tour des élections cantonales. Malheureusement, Michel Denisot et ses chroniqueurs se sont illustrés en faisant preuve d’une partialité grossière dans le traitement de leur invitée, en lui proposant de commenter une nouvelle fois les dérapages de son père dont elle s’était déjà maintes fois distanciées par le passé.
L’extrait proposé ici est tiré de la deuxième partie de l’émission, débutée par Michel Denisot en demandant à son invitée s’il y avait une différence de ligne politique entre elle et son père. Si cette question était parfaitement légitime puisqu’elle interrogeait sur un éventuel changement de ligne du Front National via le changement de son leader officiel, elle a fini par dériver sur la proposition insistante de diffuser un énième florilège des dérapages de Jean-Marie Le Pen. Quelle était la pertinence de cette démarche, alors que Marine Le Pen s’est déjà à maintes fois prononcée sur ces divers propos et que ceux-ci n’ont été relancés par aucune actualité ?
En réalité, le procédé est moins pernicieux en ce qu’il propose de commenter qu’en ce qu’il empêche de commenter, à savoir l’actualité et le positionnement politique de l’invitée, comme cela avait été le cas la veille avec Martine Aubry tout au long de son temps de parole (celle-ci put notamment s’exprimer longuement sur le cas libyen et le nucléaire). Marine Le Pen et ses interlocuteurs se sont en effet querellés pendant de longues minutes sur la question de ce montage, avant qu’Ariane Massenet ne passe au « Bureau de l’Info » et à un interrogatoire plutôt expéditif sur le positionnement et la stratégie de la présidente du FN. Que l’on soit sympathisant ou non de ce parti et de ses thèses, peut-on tolérer une quelconque inégalité de traitement de la sorte alors que les autorités ont décidé d’autoriser le Front National à participer aux élections ? A raison d’ailleurs, puisqu’il remplit a priori les critères définis par l’article 4 de la Constitution, à savoir le respect de la démocratie et de la souveraineté nationale. On pourra d’ailleurs se demander dans quelle mesure les partis de gouvernement respectent mieux ces principes que le Front National.
Soyons bien clair : ce qui est critiqué est très précisément l’usage injustifié du procédé ici décrit, et non pas l’attitude plutôt offensive adoptée par l’animateur et les chroniqueurs du Grand Journal à l’encontre de Marine Le Pen. Même si l’on peut déplorer qu’elle ne le soit pas toujours autant à l’égard de tous les invités, l’absence d’objectivité (qualité qu’aucun journaliste ne peut revendiquer) peut et doit toujours être compensée par un minimum d’équité de traitement, via notamment une interrogation sur les mêmes sujets pour tous les adversaires politiques, qui permettra une information équitable à l’encontre du téléspectateur. Ce à quoi le Grand Journal a procédé hier est une entreprise de désinformation au sens premier du terme, à savoir une entrave délibérée à une information légitime au profit d’une absence d’information.
Nota bene : L’auteur de cet article n’est ni militant ni sympathisant du Front National.
Tags : Télévision FN Marine Le Pen
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