"Les infos conspirationnistes, on ne les trouve que si on les cherche vraiment"
Dominique Cardon est sociologue au Laboratoire des usages de France Télécom R&D et chercheur associé au Centre d’étude des mouvements sociaux de l’École des Hautes Études en Sciences sociales (CEMS/EHESS). Le 29 mars 2012, à la Médiathèque de Miramas, il donne une conférence sur les sociabilités numériques (relations entre les usages des nouvelles technologies et les pratiques culturelles et médiatiques).
A l’en croire, lui et les nombreuses études sur lesquelles il se base, la plupart des internautes ne fréquentent pas le web alternatif (ou "conspirationniste"), et l’intelligence collective plébiscite les sites des médias traditionnels (écouter à partir de la 18e minute de la première vidéo) :
"60% des sites de l’Internet ne sont jamais vus, jamais lus, jamais consultés. [...] Il y a une échelle de la visibilité incroyablement distribuée sur Internet [...] : une partie des informations, nulles, inintéressantes, conspirationnistes, racistes, dangereuses, on ne les trouve que si on les cherche vraiment. [...] Moi ça fait des années que je travaille sur Internet, je ne tombe jamais sur des sites antisémites, tout simplement parce que j’ai jamais mis les bons mots clés dans le moteur de recherche. Une navigation ordinaire et normale sur Internet ne vous fait pas tomber sur ces sites, parce qu’ils ne sont pas dans les zones de haute visibilité qui ont été linkées par l’ensemble des internautes. Donc Internet est bien une poubelle, mais où on trouve quand on va fouiller de façon délibérée à l’intérieur du web. Ce qui a été filtré par l’intelligence collective des internautes [...] ne fait jamais que reproduire souvent des formes de hiérarchisation sociale et cuturelle qui sont très proches de celles de l’espace public traditionnel, et c’est pas pour rien que ce sont les sites des journaux traditionnels qui sont en tête des moteurs de recherche."
Dans un récent article de IlfattoQuotidiano.fr sur la percée de Beppe Grillo en Italie, on pouvait pourtant lire ceci :
"Il est désormais impossible d’ignorer le fait que la ligne de démarcation dans le nouveau Parlement italien entre l’« ancien » et le « nouveau » est identique à celle qui sépare ceux qui regardent et lisent les médias traditionnels de ceux qui s’informent à travers l’Internet.
Cette ligne de démarcation majeure qui traverse l’ensemble de la population italienne avait déjà commencé à poindre dans les années post-11-Septembre. Ceux qui s’informaient sur le Net savaient [qu’il y avait un problème], ceux qui continuaient à regarder la télévision en restaient à la version officielle.
Au fur et à mesure des années, la polarisation a augmenté de manière exponentielle, et la fracture est désormais avérée. On appelle cela le Digital Divide, cela signifie la « barrière digitale ». Par ce terme, on entend la ligne virtuelle de démarcation qui sépare les personnes accédant régulièrement à l’information en ligne (dite « information digitale ») de ceux qui ne le font pas."
Cette affirmation pèche manifestement par naïveté. Elle part du principe que ceux qui s’informent sur Internet vont sur des sites alternatifs, où l’on douterait notamment de la VO du 11-Septembre. Ce qui semble assez éloigné de la réalité... selon Dominique Cardon du moins.
Tags : Information et Médias Internet Réseaux sociaux
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