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En effet je ne connais rien à la pensée de Peña-Ruiz, en dehors de ce qu’il dit dans cette vidéo, et je n’ai lu aucun de ses livres - mais ça ne me donne pas envie ! Soit il est à côté de la plaque, soit il se fout de la gueule des gens. Par ailleurs je connais un peu les pratiques intellectuelles du P"G", et de ce point de vue-là Peña-Ruiz semble être bien en phase avec Mélenchon : ce sont des ectoplasmes "de gauche".
Je voulais dire des contrats de misère à durée déterminée, bien sûr.
Ça commence déjà à déraper à 11’50 : “C’est pas parce qu’on se bat pour
l’émancipation socio-économique qu’y faut laisser de côté l’émancipation
juridique et politique ; c’est pas parce qu’on se bat pour la
République sociale qu’y faut pas se battre pour la République laïque. Or
Marianne, l’allégorie de la République, ne porte pas le VOILE DE LA
SOUMISSION (c’est moi qui souligne) ; elle porte le bonnet phrygien de
l’émancipation ; le bonnet phrygien des esclaves affranchis”. On l’a pas
vue venir, celle-là, mais voilà. Il nous a bien eu, hein ? Voilà donc
comment le citoyen Peña-Ruiz, après s’être intéressé à l’émancipation
politique, s’est ensuite intéressé de très près à l’émancipation
intellectuelle et culturelle, laquelle va très vite se muer en
“émancipation laïque”… et s’y résumer tout entière, tant qu’à faire.
Comprenez bien le “message” : les femmes qui portent un voile (un hijab)
n’ont rien compris à la République, et elles se comportent comme des
esclaves. Raccourci ébouriffant, tout en finesse. Quant aux religieuses
catholiques qui portent elles aussi un voile (chrétien), on évitera bien
sûr d’en parler. No problemo.
Mais le clou, c’est à 28’02.
Le citoyen Peña-Ruiz se pose une question pour le
moins étrange : “Quel est le droit d’un chômeur de refuser de signer un
contrat de travail qui le fait sortir de la précarité ?”. Autrement dit,
notre professeur se demande pourquoi diable un chômeur ne pourrait pas
refuser un travail qui lui permet de sortir de la précarité. Il fallait y
penser. C’est vrai, y sont vraiment bourrins ces chômeurs : quand ils
trouvent enfin, après des mois ou des années de recherches
infructueuses, et alors qu’ils sont au seuil de la misère, en fin de
droits ou déjà au RSA, quand ils trouvent enfin un travail qui leur
permet de sortir de la précarité, ils ne songent même pas à se poser
cette question évidente : “Mais au fait, pourquoi je ne pourrais pas
refuser ?”. Cela prouve bien, voyez-vous, que ces chômeurs ne sont pas
suffisamment émancipés. Mais qu’ils s’émancipent donc un peu, boudiou !
Ainsi donc, il y a des millions de gens qui ne rêvent que de trouver un
contrat de travail qui les fasse sortir de la précarité, et le gars se
demande quel est le droit, pour ces gens, de refuser de signer un tel
contrat le jour où ils finissent enfin par le trouver.
Le gars ne songe pas que si les chômeurs sont très souvent portés à
refuser des emplois, c’est qu’on ne leur propose que des contrats de
misère, à temps partiel et/ou à durée indéterminée et/ou avec un lieu de
travail situé à plusieurs heures de route de leur domicile, etc. Et que
dès ce moment-là ils gagnent autant et souvent plus en cumulant des
allocations (misérables) et quelques travaux ou commerces au noir ou
illégaux. Il ne songe pas que le véritable progrès social, cela ne
consiste pas à établir un droit à “refuser de signer” un contrat de
travail qui fasse sortir de la précarité, mais au contraire à établir un droit à signer un contrat de travail qui garantisse contre la précarité -
autrement dit un contrat de travail à temps plein, à durée indéterminée
ou mieux encore avec un statut de fonctionnaire, et avec un lieu de
travail situé à une distance raisonnable du domicile.
A 51’15, Peña-Ruiz nous parle de l’hôpital : “quand un croyant entre dans un hôpital public, il a besoin de soins ; si possible sans dépassement d’honoraires”. SI POSSIBLE… Ben voyons… Faut-il traduire par “si le PG arrivait au pouvoir”, ou par “si la situation économique le permet”, ou par “si le temps le permet” ? Là encore, c’est bizarre, mais cet adhérent du P“G” ne s’empresse pas trop d’évoquer la gratuité des soins, ou le monopole d’Etat sur les services médicaux. Un oubli, encore ? Non : trop stalinien, tout ça. Il faut juste que les gens s’émancipent, et ça ira mieux.
A 52’00, un hommage à Jaurès dont on peut craindre qu’il soit légèrement orienté (mais pas trop à gauche) : “le même Jaurès déclinait ainsi l’émancipation sociale après avoir décliné l’émancipation laïque. Et cela me paraît exemplaire”. Et on ne peut pas décliner les deux en même temps ? En réalité, c’est ce que Jaurès faisait : il n’entendait pas faire passer l’émancipation sociale APRES l’émancipation laïque. “Cela me paraît exemplaire”, nous dit Henri Peña-Ruiz. Mais aujourd’hui, en 2012, l’émancipation laïque devrait encore passer AVANT l’émancipation sociale, suivant le prétendu exemple de Jaurès ? Questions d’autant plus gênantes que les gens du P“G” ont tenu à souligner tout d’abord à quel point leur démarche n’avaient rien à voir avec celle de Riposte laïque, laquelle relève de la "provocation raciste" (pour être tout à fait objectif il faudrait plutôt parler de provocation anti-religieuse). On peut donc légitimement se demander s’il n’y aurait pas un message subliminal qui serait le suivant : depuis qu’on voit Sarkozy se prosterner devant Ratzinger pour lui sucer le goupillon (tout en consultant ses SMS), et des femmes se balader en niqab dans la rue, l’émancipation laïque peut éventuellement passer avant l’émancipation sociale - et bien sûr avant le droit au travail… mais attention, on n’est pas Riposte laïque, quand même, ouh là là non, pas de racistes chez nous ! Evidemment, quand on n’est même pas capable d’envisager une sortie unilatérale de l’Union européenne ultralibérale, l’émancipation sociale peut difficilement être conçue comme une véritable priorité, même parmi d’autres. Sans parler bien sûr de l’émancipation politique !
A 58’00, le citoyen Peña-Ruiz nous livre pour finir sa définition de la
laïcité : “J’appelle laïcité le principe d’union de tout le peuple sur
la base de la liberté de conscience, de l’égalité de traitement de
toutes les convictions spirituelles, et de l’universalité de la
puissance publique”. Mais au fait, ceux qui n’ont aucune convictions
spirituelles (les agnostiques), bénéficient-ils aussi de l’égalité de
traitement ? La question est aussi tordue que la définition qui la
suscite, reconnaissons-le.
La laïcité, c’est beaucoup plus simple que ça ; c’est à la fois beaucoup
plus radical, beaucoup plus neutre et beaucoup plus clair : c’est la
NON-RECONNAISSANCE des cultes et des croyances ; leur NON-RECONNAISSANCE
par la République. Donc cela se résume en une phrase :
La République française ne reconnaît aucun culte ni aucune croyance. Point.
Et donc la République ne reconnaît ni croyants, ni athées, ni
agnostiques, ni la moindre “conviction spirituelle”. Elle ne reconnaît
que des citoyens et des étrangers.
A partir de là :
La liberté de conscience va de soi ;
L’égalité de traitement de toutes les convictions spirituelles ET DES NON-CONVICTIONS va également de soi ;
Quant à l’universalité de la puissance publique, on peut se la garder
par exemple pour des SERVICES PUBLICS GRATUITS RELEVANT DU MONOPOLE
D’ETAT (mais quelle horreur ! Halte au stalinisme soviétique !).
A 1h00’50, un passage assez gratiné : “Qu’une femme soit réduite à un
fantôme, qu’elle ne découvre le monde que les yeux retranchés derrière
un grillage de toile (il va donc directement à la case burqa sans passer
par la case niqab, ndlr), voilà qui est irrespecteux de l’égalité des
sexes, de la dignité de la femme, et de la possibilité pour la femme
d’avoir d’un droit au visage, c’est-à-dire un droit d’être un sujet, et
non pas un objet qui sera possédé par l’homme qui en aura l’exclusivité
(ndlr : goûtez la finesse et la subtilité du propos) ; déréifier la
femme, l’émanciper, c’est aussi (…) permettre de montrer la puissance
émancipatrice de la laïcité”. Et si, au lieu de “déréifier” cette femme,
on lui garantissait plutôt le droit au travail ? Et si, au lieu de se
branler avec des concepts familiers des seuls étudiants en khâgne, on
pensait plutôt à faire en sorte que toutes les conditions nécessaires à
la liberté des femmes soient réellement garanties ? Et si, au lieu de se
gargariser avec l’émancipation-des-femmes, on défendait plutôt la
mesure qui, d’un point de vue historique et même du point de vue de la
simple logique, est la première condition de l’émancipation, à savoir le droit au travail ? Et si par ailleurs on abolissait le mariage, ne serait-ce pas déjà un tout petit peu plus conséquent dans le genre j’émancipe-les-femmes ?
A 1h02’, vous noterez qu’Henri Peña-Ruiz oublie joyeusement les trois
départements concordataires français. Mais passons.
A 1h06’34, ça repart de plus belle : “Alors vous voyez pourquoi
l’émancipation laïque n’est pas toute l’émancipation ; mais c’est
quelque chose d’essentiel pour l’émancipation. Alors bien sûr on dira :
ces citoyens français de confession musulmane issus de l’immigration
maghrébine produisent trois fois plus de chômeurs que les autres parties
de la population (sic). Soit (sic). Mais c’est pas une raison pour
alléger l’exigence laïque. Parce qu’on prétendrait résoudre un problème
par une solution qui lui est pas adéquate. S’il y a un problème social
et économique de chômage, il faut lutter contre ce problème par des
mesures sociaux-économiques (lesquelles ??). Et non pas en
remettant en question le modèle républicain. Et c’est pourquoi je pense
qu’on peut marier l’exigence sociale de lutte pour la justice sociale -
par exemple quand j’étais à la commission Stasi moi je me suis battu
pour le curriculum anonyme”… Etc.
“Il faut lutter contre ce problème”… Et si, au lieu de “lutter contre”
ce problème, on le RESOLVAIT en instaurant le droit au travail ? Et ces
“mesures sociaux-économiques”, c’est quoi ? On ne le saura jamais.
Evidemment. Le protectionnisme ? Trop nationaliste, c’est moche. Le
droit au travail ? Trop stalinien, c’est caca.
A 1h07’50 : “Donc effectivement, luttons contre toutes les
discriminations racistes ou xénophobes ou ethnicistes, mais ne remettons
pas pour autant en question l’exigence républicaine”. C’est ça, luttons
camarades, luttons-contre-les-discriminations, mais surtout ne parlons
jamais du droit au travail. Saisissons la HALDE, mais n’inscrivons jamais le droit au
travail dans notre programme politique. Le citoyen Penã-Ruiz n’a pas
songé qu’avec le droit au travail, les discriminations à l’embauche
(dont je ne nie certainement pas l’existence) auraient très vite un
coup dans l’aile. Ces discriminations ethniscistes et/ou sociales
pourraient bien sûr, hélas, continuer d’exister après l’instauration du
droit au travail ; cependant elles auraient de toute évidence une
ampleur et des conséquences bien moindres. Car il s’agit aussi de discriminations sociales… Mais dans un
discours “de gôche”, il faut d’abord placer les mots “raciste” et
“xénophobe”, sans quoi on n’est plus dans le trip. Par ailleurs il faudrait peut-être se souvenir que dans notre
République, toute discrimination est illégale, et que tout contrevenant
doit être poursuivi, jugé et condamné… par la justice. La haute autorité
de lutte contre les discriminations, c’est la justice. La simple
existence d’une HALDE est une déjà une farce ; un véritable scandale.
L’existence de la HALDE est une honte pour la République.
A 1h09’50, Peña-Ruiz proclame : “Il faut combattre le communautarisme, parce
que sous prétexte de droits culturels, expression très dangereuse
(là-dessus il a tout à fait raison), on risque de consacrer des
tutelles communautaristes (…). La loi commune de la République ne doit
pas composer avec la loi particulière de la religion. Et contrairement à
ce que disent beaucoup, ce n’est pas à la laïcité de s’adapter à la
religion, c’est aux religions de s’adapter à la laïcité”. Là encore, il
faudrait seulement être capable d’énoncer des principes clairs et
cohérents, qui tiennent en peu de mots :
La République ne reconnaît aucune communauté autre que la communauté
nationale formée par les citoyens ; elle ne reconnaît que des personnes
morales, associations et entreprises - de même qu’elle ne reconnaît
aucun “croyant”, seulement des citoyens et des étrangers.
Boudiou, mais pourquoi ces gens du P“G” ne sont-ils jamais capables de
faire la moindre proposition, ni d’avancer le moindre principe solide,
même quand ils sont professeur de philosophie… ou président du parti ?
A 1h11’30, ce cri du cœur on ne peut plus significatif (dans le cadre
d’une critique, au demeurant justifiée, du concept
d’“Etat-providence”) : “je refuse de considérer que les allocations
chômage sont une manne providentielle qui tombe sur le désert à un
moment donné”. Le citoyen Peña-Ruiz ne songe pas qu’avec le droit au
travail, les allocations chômage n’auraient même plus de raison d’être.
Enfin, à 1h11’40, cette saillie qui nous semble encore une fois orientée
(orientale ?), toujours dans la même direction : “Lorsque Mme Thatcher
casse l’Etat social de droit, que fait-elle ? Elle encourage les
associations islamistes de quartier à prendre la place de l’Etat
défaillant”. Question : et Mme Thatcher n’encourage pas les associations
anglicanes de quartier à prendre la place de l’Etat défaillant ?? “La
charité ne peut tenir lieu de justice sociale”, nous dit-il un peu plus
loin en ciblant toujours la politique de Margaret Thatcher, et celle de
Sarkozy. Mais il ne songe pas que les allocations chômage, outre
qu’elles correspondent à une création de fausse monnaie, relèvent
justement de la charité - de la charité étatique en l’occurrence,
n’empêche qu’elles relèvent bien de la charité. Il me paraît décidément
douteux de se gargariser avec ces concepts de “justice sociale” ou
d’“Etat social de droit” sans jamais avancer la grande proposition qui
précisément pourrait faire advenir ces concepts dans le monde réel : le
droit au travail. Le droit au travail, c’est le contraire de la charité.
Souvenons-nous de ce 5è alinéa du préambule de la constitution du 27
octobre 1946 (celle de la IVè République), préambule auquel fait encore
référence celui de notre constitution du 4 octobre 1958 :
“Chacun a le DEVOIR de travailler et le DROIT d’obtenir un emploi”.
Certes, il y avait un piège, qui se trouve dans le 11è alinéa de ce même préambule de la constitution
du 27 octobre 1946 (avec l’invocation de la "situation économique"). Mais tout de même. Comment expliquer que des
membres du P“G” nous parlent dans ces termes des allocations chômage et
de “charité” ? Ils n’ont jamais entendu parler de la constitution ? Ils
n’ont jamais entendu parler du droit au travail ?
Ah, le droit au travail… une vieille idée qui fut de gauche avant même d’être socialiste,
et que la “gauche” comme les “socialistes”, au cours des dernières
décennies, ont pris bien soin d’enterrer aussi profond que possible,
fût-ce sous un déluge considérations pseudo-laïques et “émancipatrices”.
Reprenons donc les trois volets de l’émancipation telle que décrite par Henri Peña-Ruiz.
Emancipation politique : pas d’émancipation politique sans démocratie,
pas de démocratie sans souveraineté, pas de souveraineté sans sortie de
l’Union européenne. C’est bizarre, mais au P“G” on n’évoque jamais une
sortie de l’UE.
Emancipation laïque : pas de vraie laïcité sans affirmer la
non-reconnaissance des cultes et des croyances par la République ; et
par ailleurs, si l’on élargit un peu le débat (mais était-ce vraiment le
but recherché par Peña-Ruiz ?), alors l’émancipation dont il est
question ici, ce sont les libertés publiques et individuelles.
Emancipation sociale : pas d’émancipation sociale sans droit au
travail. Décidément, c’est bizarre, mais on P“G” on n’évoque jamais le
droit au travail.
Conclusion : tout cela ressemble quand même foutrement à une grosse mystification.
Des "syndicats communistes" ? En France, en 2010 ? C’est une plaisanterie ?
Désolé, c’était une réponse au commentaire de Manon ; je le remets au bon endroit…
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