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Commentaire de bubul01

sur Cécile Duflot pleure : la politique n'est pas le monde des Bisounours


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bubul01 17 juillet 2013 11:34

Entretien sur la politique et l’enfance par Alice Miller :
http://www.alice-miller.com/interviews_fr.php?page=11

Partie plus spécifique à la démocratie :
http://www.alice-miller.com/interviews_fr.php?page=5d

"Les décideurs politiques et économiques ne sont généralement pas capables de comprendre émotionnellement ce que leurs décisions et leurs actes peuvent signifier pour les autres. Cela semble d’ailleurs leur être indifférent. Ce qui leur importe est de s’imposer, pour un bénéfice provisoire, mais parfois même uniquement pour le geste. Dans la vie politique, on a souvent l’impression que tout ce qui compte est de décider ceci ou cela et de le réaliser immédiatement, même en sachant que les conséquences seront nécessairement dévastatrices. A mes yeux, c’est de la pure folie. L’absence de ce qu’on appelle “intelligence émotionnelle” joue un grand rôle en politique. Cela peut paraître une déclaration naïve, mais je ne parviens pas à m’expliquer autrement les raisons de décisions politiques qui finiront même, tôt ou tard, par priver le décideur de sa position.

Beaucoup de gens n’ont pas accès à leurs propres sentiments, à leurs émotions, et c’est valable aussi pour les politiciens. Leurs sentiments ont été très tôt étouffés par les coups ou par d’autres moyens. Les gens obsédés par le pouvoir ne veulent savoir que ce que les autres ont envie d’entendre, afin de le leur offrir en paroles, d’être le père soi-disant fort qui promet de protéger “le peuple”.
C’est ainsi que fonctionnait Hitler, même si les effets ont évidemment été beaucoup plus sanglants. Il proposait une représentation efficace de l’ennemi, savait exactement comment le combattre et promettait le paradis sur terre grâce à la violence, la brutalité, la Gestapo, les SS, les camps. La plupart de ceux qui l’écoutaient connaissaient depuis toujours la méthode de la carotte et du bâton et y croyaient, Hitler a donc été applaudi.

Cette promesse d’un paradis se retrouve encore dans les démocraties, sauf qu’il ne s’agit plus aujourd’hui d’éliminer une certaine catégorie de la population. A la place, on prêche la prospérité matérielle. Malheureusement, pour qu’une partie de la population puisse vivre dans l’opulence, il faut qu’une autre soit sérieusement plumée, et pour elle, adieu le paradis.

Ce qu’on nomme aujourd’hui démocratie consiste souvent à chercher à gagner la confiance des électeurs par la manipulation, par de fausses allégations, par des manœuvres de camouflage. Mais le vrai objectif des candidats au pouvoir peut encore être de refouler la conscience de l’intolérable impuissance de leur enfance en usant de la force sur d’autres. Les guerres sont le meilleur moyen pour cela : elles détournent des vrais problèmes, et elles renforcent la dépendance des citoyens plongés sans nécessité dans la détresse par la guerre. Cela peut parfaitement faire l’affaire d’un dirigeant narcissique. Même le nombre des morts reste pour lui un simple chiffre qu’il ne peut pas ressentir. Il ne peut que jouer l’émotion, et seulement celle qu’il désire montrer. L’essentiel pour lui est de rester au pouvoir. Or, un enfant ne peut jamais percevoir consciemment (même s’il peut le pressentir) que ses parents sont indifférents à son bien-être, que leurs affirmations d’amour reposent sur les mensonges de la “pédagogie noire”. Si l’enfant prenait pleinement conscience de cette vérité, cela le tuerait. Mais, plus tard, lorsque cette confiance enfantine influence sa vie d’adulte et lui dicte des décisions politiques, cela peut mener aux catastrophes graves auxquelles nous assistons régulièrement. La démocratie ne peut signifier un progrès que si les citoyens savent se servir de leur liberté. Ce n’est possible qu’à partir du moment où ils trouvent le courage de regarder en face la réalité de leur enfance, devenant ainsi capables de percer à jour les manipulations des démagogues et des charlatans de la scène politique, donc de leur refuser leurs voix. Ils n’ont plus besoin alors de s’aveugler et de se protéger par des illusions naïves (“Papa sait faire, papa va y arriver”) pour affronter la réalité du présent. Et ils sont capables d’affronter cette réalité, puisqu’ils peuvent désormais se fier à leurs perceptions et à leur sentiment personnel"


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