@Zatara
Tout est de toute façon lié à tout, donc il existe évidemment
un lien entre les différents éléments que j’ai cité. Mais ce n’est pas parce qu’il
existe des liens que tout est assimilable à tout (je sais que ce n’est pas ce que
tu dis mais je le précise). Si tout n’est pas assimilable à tout, il faut pouvoir
faire la part des choses pour comprendre chacune de ces composantes et ce qui
les différentie, raison pour laquelle je fais une distinction entre la souveraineté,
l’autonomie, l’indépendance, l’autarcie et la
Puissance. Mais je vais laisser la question de la souveraineté de coté,
je ne l’introduirai qu’à la fin et comme tu m’en fais le reproche de ne pas les
évoquer, je commencerai par les référentiels structurels. Je vais tenter de
partir de zéro et monter des étages petits à petits.
Le premier des référentiels structurants par lequel je
débuterai (il y’en a d’autres en amont qui sont à mon sens d’ordre spirituels,
je n’en parlerai pas ici mais j’avais
effleuré le sujet dans cet article ) est le fétichisme du pouvoir qui va
entrainer la lutte pour la domination. Pour aller au plus rapide, je dirai que depuis
au moins la révolution néolithique existe une compétition entre les groupes
fédérateurs humains dont l’objet est la domination ou la résistance à la
domination et qui va entrainer l’état de guerre c.à.d. une disposition mutuelle, constante et manifeste de détruire
les groupes ennemis ou de les affaiblir par tous les moyens qu’on peut
(ce n’est que lorsque le moyen utilisé devient militaire que l’on parle de guerre
proprement dite). C’est à ce niveau qu’intervient la Puissance : elle caractérise
la capacité d’un groupe fédérateur à agir sur les autres pour atteindre ses
objectifs et préserver voire renforcer sa suprématie ou encore résister à la
suprématie d’un autre groupe. La puissance est un concept complexe et mouvant qui
fait entrer en ligne de compte une multitude de paramètres dont l’importance et
la combinaison varient selon les moments (les paramètres de la puissance à l’époque
de la Grèce antique ne sont pas ceux de l’époque napoléonienne qui ne sont eux-mêmes
pas ceux d’aujourd’hui), elle est à la fois une notion objective et subjective.
Mais on retrouve bien évidemment des paramètres intemporels comme la démographie,
la géographie, les ressources territoriales, les croyances collectives, les institutions,
la capacité à créer et assimiler les technologies, la capacité à élaborer des
alliances diplomatiques, le commerce etc.
Sur ce référentiel structurant va s’en greffer un autre qui
naitra aux environs du XIIIe et XIVe et qui explosera entre
le XVIIIe et le XIXe siècle : le processus
capitaliste ! C’est-à-dire que l’on passe d’une économie de subsistance
limitée par les institutions des sociétés traditionnelles et qui a pour
finalité la satisfaction des besoins humains à un processus économique
cumulatif qui n’a plus d’autres horizons que sa propre reproduction, d’où l’impératif
de production illimité. C’est de là que va naitre ce culte de la croissance puisque
l’expansion sans limite des affaires devient le but suprême, la stabilité devient au contraire synonyme
d’immobilisme et de stérilité, en cas de saturation des marchés, on en
crée de nouveaux par la colonisation, la publicité, le marketing, les avancées
sociétales (marché de la femme, marché de l’enfance etc) et si tout cela ne
marche pas il reste la guerre.
Le processus capitaliste avait besoin des structures socio Etatiques
pour se développer et ces dernières avaient
elles mêmes besoin de lui dans les luttes qu’elles se livraient les unes les
autres pour la domination. Les classes dirigeantes politiques ont vite compris
le profit que pouvait en tirer les Etats puisque le facteur économique devenait
le paramètre déterminant de la Puissance
( ça n’a pas toujours été le cas contrairement à ce que certains peuvent croire
, Sparte par exemple était pauvre mais ça ne l’a pas empêché de parvenir à
dominer la Grèce, il y’a d’autres exemples historiques). Les Etats vont donc accompagner ce processus et
élaborer des stratégies de développement économiques, ce qui mènera à une course à l’innovation qui
débouchera sur les révolutions industrielles. Concomitamment à cette course au développement
économique va naitre tout un discours de légitimation de ce processus qui prône
l’amélioration de la condition humaine par l’accumulation matérielle avec toute
la dimension messianique que cela comporte. Comme toujours l’idéologie est là
pour habiller une réalité bien plus terre à terre : la lutte pour la
domination économique.
Cette émulation entre les Etats va permettre à des entités économiques
de se constituer en puissance à part entière. Ces entités ont très bien compris
que les structures Etatiques, si elles leur ont été utiles à un moment de l’histoire
constituent à l’ère du capitalisme triomphant une entrave. Le processus capitaliste
fluidifie le monde car la fluidification intensifie les échanges. Dans un monde
liquéfié, ce qu’il reste d’entité solide (les Etats) deviennent des boulets :
il faut donc tuer l’instinct territorial et reconfigurer les pouvoirs afin qu’ils ne soient plus entre les mains de
ceux qui détiennent et organisent les territoires mais soient transférés
vers ceux qui détiennent les marchandises et les capitaux et qui organisent
leur circulation et leur distribution, ainsi que celle des personnes. C’est sur
cette volonté que va se greffer les
discours de légitimation mondialiste culturel (contre les nations et l’enracinement
en général mais en faveur du multiculturalisme et du cosmopolitisme) économique
(les vertus du néolibéralisme mondialisée que l’on vante par de l’idéologie
mais que l’on prétend être une science, voir carrément une science dure ) et
politique ( on pose que les Etats nations sont fondamentalement dangereux car
ont tendance à être en guerre perpétuelle et on propose l’alternative de leur
dissolution dans de grands ensembles d’intégration régionaux et continentaux
ayant pour finalité une entité politique mondiale unique en vue d’une paix universelle).